LE CONTRAT D’AGENCE COMMERCIALE

« L’agence commerciale jouit d’une place privilégiée dans l’arsenal juridique, et ce, tant au niveau européen que national »

A). CADRE LÉGAL

Alors qu’en droit européen, d’autres modes de distribution (tels que la concession de vente ou la franchise) ne font l’objet d’aucune réglementation de fond et n’ont été envisagés par le législateur européen que sous l’angle du droit de la concurrence, l’agence a quant à elle fait l’objet, dès 1986, d’une véritable consécration législative à travers la Directive 86/653 du Conseil des Communautés européennes du 18 décembre 1986 relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux indépendants (ci-après « la Directive 86/653 » ou « la Directive »).

Cette directive fut transposée en droit belge par la loi du 13 avril 1995, aujourd’hui insérée dans le titre 1er du Livre X du Code de droit économique.

B). NOTION DE CONTRAT D’AGENCE COMMERCIALE

Le contrat d’agence commerciale est défini par le Code de droit économique comme le « contrat par lequel une des parties, l’agent commercial, est chargée de façon permanente, et moyennant rémunération, par l’autre partie, le commettant, sans être soumise à l’autorité de ce dernier, de la négociation et éventuellement de la conclusion d’affaires au nom et pour compte du commettant. L’agent commercial organise ses activités comme il l’entend et dispose librement de son temps » (art. I.11.1°).

C). ELÉMENTS CARACTÉRISTIQUES DU CONTRAT D’AGENCE COMMERCIALE

Le texte de l’article I.11.1° du Code de droit économique prévoit les éléments constitutifs suivants :

a) Une activité permanente

La relation individuelle qui unit l’agent et son commettant doit être une relation permanente, organisée et stable.

Cette exigence de permanence et de régularité exclut dès lors toute activité dite occasionnelle. Par contre, une activité accessoire pourra rentrer dans le champ d’application de la loi dès lors qu’elle est permanente.

b) Négociation et éventuellement conclusion d’affaires au nom et pour le compte du commettant

L’agent commercial est donc chargé de négocier et éventuellement de conclure des affaires, au nom et pour le compte du commettant.

La prospection et la visite de clientèle font partie intégrante de son activité. La conclusion d’affaires n’est, par contre, pas un élément caractéristique du contrat d’agence commerciale, puisque l’agent est seulement chargé de conclure éventuellement des affaires.

Le terme « affaires » est ici envisagé de manière large, ce qui permet d’englober les services tels que la publicité, les voyages ou les transports.

Enfin, l’agent commercial n’agit, vis-à-vis du client final, ni pour son compte, ni en son nom, mais bien au nom et pour le compte du commettant et c’est en tant que tel qu’il doit se présenter auprès de la clientèle.

c) Contre rémunération

La rémunération constitue un élément essentiel du contrat de l’agent. Cette notion doit être entendue de manière large : on considère en effet qu’il y a rémunération dès que l’agent perçoit une contrepartie à son activité.

d) Absence d’autorité du commettant

L’agent exerce sa mission de manière autonome et indépendante, en l’absence de tout lien de subordination. C’est en ce sens que la Directive 86/653 le qualifie expressément d’« intermédiaire indépendant ». L’indépendance de l’agent n’interdit cependant pas que le commettant lui donne des directives ou instructions impératives.

D). CARACTÈRE INTUITU PERSONAE DU CONTRAT D’AGENCE COMMERCIALE

Certains considèrent que le contrat d’agence est, par nature, intuitu personae dans le chef de l’agent, même si le degré de l’intuitu peut varier. Par conséquent, le contrat d’agence commerciale prendrait fin par le décès, la faillite ou la survenance d’une cause d’incapacité dans le chef l’agent.

Cette caractéristique du contrat d’agence est cependant discutée. Le caractère intuitu personae du contrat sera le plus souvent expressément mentionné dans celui-ci. A défaut d’une telle disposition expresse, il se peut que la solution doive être appréciée différemment selon chaque cas d'espèce.

E). AVANTAGES DU CONTRAT D’AGENCE COMMERCIALE

Le contrat d’agence commerciale présente des avantages tant pour le commettant que pour l’agent.

Dans le chef du commettant, il lui permet notamment :

- de disposer d’un beaucoup plus grand contrôle sur son mode de distribution, notamment en fixant lui-même les prix de vente ;

- d’éviter de devoir s’engager lui-même dans la prospection d’un marché qu’il ne connaît pas, en recourant à des indépendants locaux, plutôt que de devoir supporter le risque et le coût de l’implantation d’une filiale de distribution propre.

Pour l’agent, un contrat d’agence lui permet d’assurer la distribution de produits fabriqués par un tiers, tout en limitant ses risques et en bénéficiant d’une certaine protection légale.

F). OBLIGATIONS PRÉCONTRACTUELLES

Le contrat d’agence devra respecter les obligations en matière d‘information précontractuelle prévues au titre 2 du Livre X du Code de droit économique (art. X.26 à 34 CDE) si il peut être qualifié d’accord de partenariat commercial au sens de ces dispositions.

Une analyse devra, à cet égard, être effectuée au cas par cas, en tenant compte des circonstances de fait.

Ainsi, pour que le contrat d’agence relève de ces dispositions, il faut qu’il constitue…

a) Un accord de partenariat commercial

La loi ne donne aucune précision quant à la définition de ce « partenariat commercial ». Un partenariat commercial suppose donc une certaine structure, une durée certaine ou l’existence d’un contrat-cadre régissant les relations des parties.

b) Conclu entre plusieurs personnes

c) Par lequel une de ces personnes octroie à l’autre le droit d’utiliser une formule commerciale

La formule commerciale peut consister en une « enseigne commune », un « nom commercial commun », le transfert d’un savoir-faire ou encore une « assistance commerciale ou technique ». Il suffit qu’un seul de ces quatre éléments soit présent pour que la loi soit d’application.

L’enseigne peut être définie comme le signe placé sur la façade de l’agence et qui permet d’identifier territorialement le fonds de commerce de l’agent.

Le nom commercial désigne quant à lui l’entité économique exploitée par la société, autrement dit, le nom sous lequel l’entreprise concernée exerce ses activités.

On parlera d’assistance commerciale ou technique lorsque le commettant fournira à l’agent un appui logistique et/ou une expertise et des conseils.

d) Lors de la vente de produits ou de la fourniture de services

Si ces quatre conditions sont remplies, le titre 2 du Livre X du Code de droit économique régira donc la phase précontractuelle du contrat d’agence.

Pour de plus amples développements relatifs aux obligation que ce titre contient, au contenu du document d’information précontractuelle, à la forme qu’il doit revêtir ou encore aux sanctions relatives au non-respect de ces obligations, nous vous renvoyons à l’article consacré à cette matière.

G). PÉRIODE CONTRACTUELLE

1). Durée du contrat d’agence commerciale

Le contrat d’agence peut être conclu pour une durée déterminée ou indéterminée (article X.2, al. 1er du Code de droit économique).

a) Contrat à durée déterminée

La fixation d’une durée déterminée au contrat supposera impérativement l’existence d’un écrit indiquant celle-ci.

Il est également possible que le contrat d’agence commerciale soit conclu pour une durée déterminée avec faculté de résiliation anticipée à un moment convenu, moyennant l’octroi d’un préavis (article X.16, §1er du Code de droit économique).

b) Contrat à durée indéterminée

Le contrat d’agence commerciale peut être conclu pour une durée indéterminée.

Lorsqu’il n’a pas fait l’objet d’un écrit ou lorsque, ayant fait l’objet d’un écrit, sa durée n’est pas déterminée, il est censé être à durée indéterminée.

De même, un contrat à durée déterminée qui continue à être exécuté après l’arrivée du terme est censé être un contrat à durée indéterminée dès sa conclusion, sauf s’il est reconduit pour une durée déterminée (art. X.2, alinéa 3 CDE).

c) Clause d’essai

Aucune disposition ne permet aux parties de conclure un contrat à l’essai. Le seul moyen d’évaluer le travail de l’agent avant de conclure un contrat définitif serait de conclure un premier contrat à durée déterminée, qui servira de période d’évaluation, à l’issue duquel il pourra être décidé soit de conclure un nouveau contrat à durée déterminée ou indéterminée, soit de ne pas poursuivre la collaboration.

2). Droits et obligations des parties au contrat d’agence commerciale

La loi sur le contrat d’agence met très clairement en évidence la réciprocité des droits et obligations des parties. Certains articles sont en effet rédigés de manière quasiment symétrique pour l’agent et pour le commettant.

a) Obligations de l’agent

Il incombe à l’agent commercial, conformément à l’article X.4 du Code de droit économique, les obligations suivantes :

1° Veiller aux intérêts du commettant et agir loyalement et de bonne foi

Il découle de ce devoir général de loyauté et de bonne foi que l’agent doit :

- conserver, séparément de ses propres deniers, toute somme perçue pour le commettant et la remettre sans délai à celui-ci ;

- tenir régulièrement les comptes des opérations réalisées pour le commettant ;

- agir avec discernement et éviter de traiter avec des clients ou prospects notoirement insolvables, même si l’agent n’est pas lié par une clause de ducroire ;

- conserver les biens qui lui sont confiés pour l’exécution de sa mission et les restituer au commettant lors de la cessation du contrat, pour autant qu’il n’en ait pas disposé dans le cadre de son activité normale et sous réserve de son droit de rétention ;

- garder secrète toute information à caractère confidentiel qui viendrait à sa connaissance en raison ou à l’occasion du contrat d’agence et ce, également après la cessation du contrat.

2° Négocier et, le cas échéant, conclure les affaires dont il est chargé

L’agent est investi d’une obligation de « faire ». Il s’agit en principe d’une obligation de moyens mais certains contrats prévoient, à cet égard, une clause de quota minimal fournissant des précisions sur le rendement exigé de l’agent commercial.

3° Communiquer au commettant les informations dont il dispose

Les informations visées ici sont :

- D’une part, celles portant sur l’activité propre de l’agent, telles que la remise régulière de rapports présentant les résultats de son activité (affaires négociées ou conclues, risque d’insolvabilité des clients, réclamations des clients, etc.) ; il ne pourrait cependant être exigé de l’agent qu’il remette un compte rendu détaillé de chacune de ses démarches, ce qui irait à l’encontre de son indépendance et pourrait être révélateur de l’existence d’un lien de subordination ;

- D’autre part, celles recueillies dans le cadre du rapport de l’agent avec la clientèle, que le commettant ignorerait si l’agent ne l’en informait pas. Il peut s’agir de renseignements concernant l’état du secteur exploité, susceptibles d’orienter la production de la firme, les conditions du marché, les changements de mode, les réactions de la clientèle… bref, tout ce qui peut orienter le commettant. Il appartiendra alors à l’agent de faire part au commettant du résultat de ses observations et de lui présenter toute suggestion qu’il estime opportune en vue de l’amélioration du produit et des ventes.

4° Se conformer aux directives raisonnables du commettant

Ces directives ne peuvent toutefois pas affecter l’indépendance qui caractérise l’agent commercial. L’agent commercial ne peut recevoir du commettant que des instructions générales, concernant par exemple les conditions de vente ou la politique commerciale du commettant.

5° Possibilité de recourir à des sous-agents

« L’agent commercial peut, pour l’exécution de sa mission, recourir à des sous-agents rémunérés par lui et agissant sous sa responsabilité, et dont il devient le commettant » (art. X.5 CDE).

La relation entre l’agent et ses sous-agents éventuels sera bien sûr également régie par les dispositions du Code de droit économique, l’agent dit « principal » acquérant ici la qualité de commettant, et ses sous-agents celle d’agents.

Cette disposition du Code de droit économique n’est pas impérative : le commettant pourrait donc interdire à l’agent de recourir à des sous-agents.

b) Obligations du commettant

Il incombe au commettant, conformément à l’article X.6 du Code de droit économique, les obligations suivantes :

1° Le commettant doit agir loyalement et de bonne foi

L’article X.6 du Code de droit économique rappelle également, à charge du commettant, le principe général contenu dans l’article 1134 du Code civil selon lequel le commettant doit agir loyalement et de bonne foi.

Cette obligation constitue le reflet exact de la même obligation imposée à l’agent.

2° Le commettant doit procurer à l’agent la documentation et les informations nécessaires à l’exécution du contrat d’agence

Ceci peut donc viser des éléments tels que des échantillons, tarifs, conditions générales, imprimés publicitaires, dessins, etc.

Les informations « générales » peuvent concerner la politique commerciale et la capacité de production du commettant, la désignation des clients qu’il entendrait se réserver et de ceux avec lesquels il ne voudrait plus contracter, les réactions de la clientèle portées directement à sa connaissance, des données relatives à l’état du marché, etc.

3° Le commettant doit informer l’agent de son acceptation, de son refus ou de l’inexécution d’une affaire dans un délai raisonnable

3). Rémunération de l’agent commercial

L’article X.7 du Code de droit économique énonce que « la rémunération de l'agent commercial consiste soit en une somme fixe, soit en des commissions, soit en partie en une somme fixe et en partie en des commissions ».

- La rémunération de l’agent peut consister (totalement ou partiellement) en une somme fixe, pouvant être cumulée avec l’octroi de commissions complémentaires liées au résultat.

Le recours à un mode de rémunération fixe est, par ailleurs, un moyen pour le commettant d’éviter toute discussion quant aux commissions indirectes auxquelles pourrait prétendre l’agent.

- La plupart des contrats d’agence prévoient cependant que la rémunération sera variable et dépendra du résultat de l’activité de l’agent. Une rémunération variable est au demeurant plus compatible avec le statut d’indépendant de l’agent. Le Code de droit économique qualifie de commission tout élément de la rémunération de l’agent variant avec le nombre ou la valeur des affaires (art. X.7, alinéa 2 CDE).

Sont donc visées non seulement les commissions qui consistent en un pourcentage sur la valeur des affaires, mais également, par exemple, les primes accordées en cas de dépassement d’un seuil fixé en termes de chiffre d’affaires ou de nombre de contrats conclus.

4). Clauses particulières du contrat d’agence commerciale

L’exclusivité (au sens large) dans les contrats d’agence peut être stipulée tantôt au profit d’une partie, tantôt au profit de l’autre, tantôt des deux.

Lorsque c’est l’agent qui s’engage à n’intervenir que pour un seul commettant, on parlera de clause non-concurrence.

Si c’est le commettant qui s’engage à réserver tout ou partie de sa clientèle ou d’un territoire à l’agent, on parlera plutôt de clause d’exclusivité.

a) Clause d’exclusivité

L’octroi d’une exclusivité au profit de l’agent a une influence sur les commissions qui lui sont dues : si l’agent bénéficie d’une exclusivité sur un territoire ou vis-à-vis d’une clientèle spécifique, il aura droit à une commission « indirecte » sur toute vente, même réalisée sans son intervention, sur ce territoire ou à l’attention de la clientèle dont l’exclusivité lui a été réservée.

Sous réserve de l’application éventuelle des dispositions relevant du droit de la concurrence et de ce qui précède, les parties sont libres de modaliser comme elles l’entendent les contours d’une telle clause d’exclusivité.

Différents types d’exclusivité peuvent être envisagés : elle peut viser un territoire particulier, un certain type de clientèle, être limitée à certains produits ou services, ou encore consister en une combinaison de ces différents types d’exclusivité.

b) Clause de non-concurrence

Le Code de droit économique ne prévoit pas expressément une obligation de non-concurrence de l’agent pendant la durée du contrat. La liberté d’entreprendre implique donc que l’agent a le droit d’exercer une activité concurrente à celle de son commettant.

Cette liberté concurrentielle de principe de l’agent sera néanmoins limitée à deux égards :

1° L’agent devra respecter l’obligation d’agir loyalement et de bonne foi (art. X.4 du CDE) ;

Il découle cette obligation de loyauté que l’agent est tenu, durant la phase des pourparlers, de signaler à son futur commettant qu’il représente éventuellement déjà l’un de ses concurrents directs. Cette obligation pourrait également éventuellement limiter certaines activités concurrentes de l’agent pendant le contrat, en fonction des circonstances.

2° La seconde limite à cette liberté concurrentielle pourrait être conventionnelle. Une telle stipulation contractuelle devra, elle-même, être limitée dans le temps, dans l’espace et quant à son objet. Rappelons en outre qu’une telle obligation de non-concurrence devra respecter les règles issues du droit européen de la concurrence.

c) Clause de ducroire

La clause ducroire est celle par laquelle l’agent garantit des obligations incombant à des tiers dans une affaire qu’il a négociée ou conclue.

Les conditions de validité d’une telle clause de ducroire sont les suivantes :

1° Elle doit faire l’objet d’un écrit (art. X.23 CDE) ;

2° Elle ne peut concerner qu’une affaire dans laquelle l’agent est intervenu personnellement;

3° La clause de ducroire cesse d’être applicable lorsque le commettant modifie, sans l’accord de l’agent, les conditions de livraison ou de paiement ;

4° L'agent commercial ne peut s'engager pour un montant qui dépasse la commission convenue, à moins que son engagement ne se rapporte soit à une affaire déterminée, soit à des affaires qu'il conclut lui-même au nom du commettant ;

5° Enfin, sauf clause contraire écrite, l’agent commercial qui se porte ducroire ne garantit que la solvabilité du tiers à l’exclusion de tout autre manquement de celui-ci à ses obligations contractuelles.

L’article X.23 du Code de droit économique contient par ailleurs une disposition permettant au juge d’éventuellement réduire la portée de l’obligation d’indemnisation de l’agent. En effet, « s'il y a une disproportion manifeste entre le risque que l'agent commercial a assumé et la commission convenue, le juge peut réduire le montant dont l'agent est tenu, dans la mesure où ce montant dépasse la commission. Le juge tient compte de toutes les circonstances, notamment de la manière dont l'agent commercial a veillé aux intérêts du commettant ».

Ceci implique donc un tempérament important à la portée de la clause de ducroire, dont le fondement nous paraît devoir être recherché dans l’équité.

H). PÉRIODE POST-CONTRACTUELLE

1). Clause de non-concurrence post-contractuelle

Les parties peuvent prévoir, dans leur contrat d’agence, une clause de non-concurrence post-contractuelle régie expressément par l’article X.22 du Code de droit économique : par cette clause, l’agent s’interdit toute activité concurrente à celle du commettant une fois le contrat terminé.

Une telle clause de non-concurrence post-contractuelle doit répondre aux conditions et limites fixées par le Code de droit économique :

1° Elle doit avoir été stipulée par écrit ;
2° Elle doit concerner le type d’affaires dont l’agent était chargé ;
3° Elle ne doit viser que le secteur géographique ou le groupe de personnes et le secteur géographique confiés à l’agent ;
4° Elle ne peut excéder six mois après la cessation du contrat.

Par ailleurs, le droit européen de la concurrence impose lui aussi certaines conditions à respecter afin que la clause soit admise à cet égard.

2). Modes de résolution du contrat d’agence commerciale

a) Modes généraux de dissolution

Le contrat d’agence commerciale peut prendre fin par les modes généraux de dissolution suivants :

- Les parties au contrat d’agence peuvent bien entendu mettre fin amiablement à leur contrat, en réglant elles-mêmes les modalités d’une telle résiliation ;

- Si le contrat d’agence a été conclu pour une durée déterminée, il prendra en principe fin de plein droit à l’échéance du terme convenu, sans que les parties ne doivent formellement notifier un quelconque préavis de non-renouvellement ;

- Il arrive également qu’une partie au contrat d’agence estime que son cocontractant a manqué à ses obligations, sans que ce manquement rende immédiatement et irrémédiablement impossible la poursuite des relations (il s’agirait alors d’un manquement grave), et opte dès lors pour l’introduction d’une action en résolution judiciaire du contrat pour inexécution fautive, sur pied de l’article 1184 du Code civil ;

- Si le contrat est conclu intuitu personae en considération de la personne de l’agent, il prend fin par le décès ou la faillite de celui-ci;

- En outre, un acte équipollent à rupture pourrait également justifier la rupture du contrat si, en modifiant de manière unilatérale une des conditions essentielles du contrat, l'une des parties manifeste son intention de rompre et procède dès lors à la résiliation du contrat ; ainsi, s’agissant des commissions dues à l’agent, le Code de droit économique prévoit que « toute modification unilatérale, au cours de l’exécution du contrat d’agence commerciale, du ou des taux initialement convenus constitue un acte équipollent à rupture » (art. X.13, al. 7 CDE) ;

- La caducité du contrat pourrait elle aussi justifier la dissolution du contrat : l’arrêt par le commettant de la fabrication ou de la distribution des produits pourrait, par exemple, être assimilé à une cause de caducité du contrat ; en effet, si la fabrication des produits vient à cesser, l’objet du contrat de concession disparaît et celui-ci devient donc caduc.

b) Résiliation ordinaire moyennant préavis

L’article X.16 du Code de droit économique impose le respect d’un préavis pour la résiliation d’un contrat d’agence à durée indéterminée ou d’un contrat d’agence conclu pour une durée déterminée avec faculté de dénonciation anticipée.

A défaut pour les parties d’avoir aménagé conventionnellement la durée du préavis, celle-ci sera, conformément au texte légal, d’un mois pendant la première année du contrat ; après la première année, la durée du délai de préavis sera augmentée d’un mois par année supplémentaire commencée, sans que ce délai puisse excéder six mois. Ces délais constituent un minimum.

Les parties sont libres de convenir un délai préavis plus long, à la condition toutefois que le délai conventionnel imposé au commettant ne puisse être inférieur à celui que devra respecter l’agent.

c) Résiliation extraordinaire pour manquement grave ou circonstances exceptionnelles

L’article X.17 du Code de droit économique dispose que « chacune des parties peut, sous réserve de tous dommages et intérêts, résilier le contrat sans préavis ou avant l’expiration du terme, lorsque des circonstances exceptionnelles rendent définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre le commettant et l’agent ou en raison d’un manquement grave de l’autre partie à ses obligations ».

Le manquement grave peut être défini comme le manquement qui rend définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre les parties, et qui est laissé à l’appréciation du juge.

Les circonstances exceptionnelles sont, quant à elles, en principe étrangères à l’idée de faute. Elles correspondent à une modification soudaine de la situation du marché, qui rend impossible la poursuite du contrat.

La rupture pour manquement grave ou circonstances exceptionnelles peut donc être invoquée sans préavis, pour autant que la preuve du manquement grave ou des circonstances exceptionnelles soit apportée par la partie qui s’en prévaut. Celle-ci pourra en outre réclamer le paiement de dommages et intérêts,

d) Clauses résolutoires expresses et conditions résolutoires

Les clauses résolutoires expresses permettent de mettre fin à un contrat avec effet immédiat et sans préavis ni indemnité en cas de survenance de l’événement futur et incertain qui les conditionne, cet événement futur et incertain étant lié à l’inexécution fautive de la convention par une des parties au contrat. Leur validité en matière de contrats d’agence commerciale est contestée.

Une telle clause résolutoire expresse, insérée dans un contrat d’agence commerciale, ne pourrait en tous cas être admise que si les conditions suivantes sont respectées :

1° La partie qui entend se prévaloir d’un pacte commissoire exprès le fait dans le délai de rigueur prévu par l’article X.17 du Code de droit économique ;

2° Un contrôle judiciaire a posteriori est possible et effectif ;

3° L’exigence d’une mise en demeure préalable est respectée, si la clause n’en dispense pas expressément les parties.

Les conditions résolutoires permettent elles aussi de mettre fin à un contrat avec effet immédiat et sans préavis ni indemnité en cas de survenance de l’événement futur et incertain qui les conditionne, cet événement futur et incertain pouvant cependant être totalement étranger à l’idée de faute.

e) Indemnité d’éviction

L’article X.18 du Code de droit économique dispose qu’« après la cessation du contrat d’agence commerciale, l’agent commercial a droit à une indemnité d’éviction lorsqu’il a apporté de nouveaux clients au commettant ou a développé sensiblement les affaires avec la clientèle existante, pour autant que cette activité puisse encore procurer des avantages substantiels au commettant ».

L’indemnité d’éviction est destinée à réparer le préjudice que cause, à l’agent, la perte de clientèle qu’il a contribué à créer ou à augmenter pendant l’exécution du contrat et dont le commettant continue à retirer les avantages après sa dissolution. Elle ne vise donc pas à réparer le préjudice subi par l’agent en raison de l’irrégularité de la rupture du contrat sans préavis ou avec un préavis considéré comme insuffisant.

Deux conditions principales doivent être remplies pour qu’une telle indemnité puisse être octroyée à l’agent qui le demande :

1° L’agent commercial doit avoir apporté de nouveaux clients au commettant ou avoir sensiblement développé les affaires du commettant avec la clientèle existante :

2° La conservation, par le commettant, d’avantages substantiels : pour pouvoir bénéficier d’une indemnité de clientèle, l’agent devra en outre prouver que cette clientèle est susceptible d’« encore procurer des avantages substantiels », c’est-à-dire significatifs, au commettant après la fin du contrat.

Cette indemnité d’éviction ne sera, par contre, pas due dans trois hypothèses prévues expressément par la loi (art. X.18, al. 5 CDE) :

1° Si le commettant a mis fin au contrat d’agence commerciale en raison d’un manquement grave prévu à l’article X.17, alinéa 1er, imputable à l’agent ;

2° Si l’agent a mis fin au contrat d’agence commerciale, à moins que cette cessation ne soit due à un motif prévu à l’article X.17, alinéa 1er, imputable au commettant ou qui soit la conséquence de l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent commercial en raison desquels la poursuite de ses activités ne peut raisonnablement plus être exigée de lui ;

3° Lorsque, selon un accord avec le commettant, l’agent commercial ou ses héritiers cède(nt) à un tiers les droits et obligations qu’il(s) détien(nen)t en vertu du contrat d’agence commerciale.

f) Indemnité complémentaire

L’indemnité complémentaire vise quant à elle la réparation du préjudice que cause à l’agent la cessation de ses relations avec le commettant.

L’agent pourra prétendre à l’indemnité complémentaire à la triple condition :

1° Qu’il ait droit à l’indemnité d’éviction visée à l’article X.18 du Code de droit économique ;

2° Que l’indemnité d’éviction ne couvre pas l’intégralité du préjudice réellement subi ;

3° Qu’il prouve l’étendue de son préjudice.

La loi n’exige donc pas que l’agent démontre l’existence d’une faute du commettant qui engagerait sa responsabilité sur la base du droit commun.